Transcription Conférence 20 Mars 2002

Transcription intégrale de la conférence donnée à l’intention de l’ensemble du personnel de la communauté éducative de l’académie de Toulouse le 20 mars 2002, Espace Hermès – lycée Charles de Gaulle – MURET.

Imaginez, une famille de 4 enfants. L’aîné a 13 ans et le plus jeune a 4 ans. L’aîné a passé toutes les grandes vacances à se balader avec un bob sur la tête, il mangeait, courait donc il passait tout son temps avec le bob. Un jour, il pleuvait et il a posé son bob sur sa chaise, et naturellement le bob dégouline sur le sol. Le petit frère de quatre ans rentre dans la chambre du grand frère ; quand il voit le bob sur la chaise et plein d’eau par terre, il court dans la cuisine et dit à sa mère « Maman, William a fondu. »

Cela, c’est un mot d’enfant, cela veut dire quelque chose qui peut appartenir à n’importe quel enfant, mais d’un autre côté, un autre me disait un jour : « Peut-être qu’en allant très loin dans l’espace on sort du jouet d’un enfant. » Et une autre enfant de huit ans disait « j ’aimerais bien que ma tête soit au cimetière. »

Ces différents exemples situent la précocité dans sa difficulté, c’est-à-dire qu’on est tenté par le réflexe du détail, dans une description réduite à sa plus simple expression. Parce que tous les enfants risqueraient d’être confondus avec des précoces.

Lorsqu’un enfant est décrit comme étant rêveur, étourdi, exigeant, colérique, lorsqu’il n’apprécie pas ou peu les activités collectives, lorsqu’il rechigne à aller à l’école, on pourrait considérer qu’il exerce son métier d’enfant comme beaucoup d’autres enfants.

D’où la nécessité de définir avec précision l’enfant et l’adolescent intellectuellement précoce par les tests psychométriques ainsi que par le comportement clinique, c’est-à-dire le comportement de ses activités de tous les jours, afin d’éviter les abus d’utilisation du terme « précoce » ; ce sont des abus d’utilisation que l’on rencontre dangereusement et de plus en plus souvent, sur l’air de la certitude absolue. Beaucoup de parents utilisent l’argument d’une hypothétique précocité intellectuelle pour justifier un échec scolaire.

Trop de parents préfèrent accuser un système pédagogique plutôt que de se poser la question de leur propre responsabilité, de leur propre implication, de leur propre engagement éducatif.

C’est pour cette raison que je remercie toutes les personnes qui ont eu le réflexe ou le courage, d’organiser l’échange d’aujourd’hui.

La précocité intellectuelle s’est mise en place, en terme de sensibilisation, il y a une vingtaine d’année, 21 ans exactement puisque j’ai eu l’occasion de rencontrer un professeur de mathématiques, Paul Merchat, avec une situation de paradoxe : c’est-à-dire celle d’un enfant présenté comme étant en situation d’échec scolaire alors que les résultats des tests mettaient en évidence son appartenance à un créneau qu’on peut considérer comme étant le créneau d’exception.

A partir de cette constatation, du travail d’observation et du travail de recherche auprès d’enfants et d’adolescents, à partir de situations de brillance et d’efficacité scolaires, à partir de situations pathologiques et de contacts avec des structures à l’étranger consacrées surtout aux enfants surdoués : en Allemagne (association EREW), Espagne, Portugal, Italie, Belgique (association BEKINA), USA, Pologne… nous avons conceptualisé au fil des années la Précocité Intellectuelle.

En même temps, au fur et à mesure de cette élaboration, nous avons observé l’éclosion d’initiatives, d’ouvertures de classes, de créations de structures scolaires hors-contrat, promettant toutes, l’Eldorado de la réussite scolaire, et se targuant de la paternité de la précocité intellectuelle, et naturellement balayant tous les travaux accomplis jusque-là. C’est ainsi qu’on pourrait prétendre connaître un pays à partir d’une brochure d’un club de vacances, tout cela avec un renfort de reportages, des émissions plus ou moins inspirées, avec de futurs ingénieurs en aéronautique et l’incontournable Lettre à Elise au piano, car un précoce est forcément un futur ingénieur et pianiste.

D’où la nécessité d’une remise des pendules à l’heure, d’autant plus que cette floraison d’initiatives s’accompagne d’énormités pseudo-psychologiques comme par exemple, les précoces n’existent pas, il faut dire des surdoués et par conséquent on observe des réactions viscérales d’hostilité vis-à-vis de ce que l’on peut considérer souvent comme le handicap d’une population à risque.

Je dis  bien « souvent », car il existe des précoces heureux.

Et tout en reconnaissant que lorsque j’entends une petite fille, à la télévision, dire que « l’orthographe est la science des imbéciles », j’ai plutôt envie de lui botter le Q.I.. ( Rires ).

L’enfant intellectuellement précoce est trop souvent présenté ou représenté avec une tête bien ronde, des lunettes bien rondes, tout en sourire et en racines carrées, avec des ordinateurs en guise d’oreiller.

On l’imagine très studieux, très scolaire, courtois, généreux, prévenant, pertinent, vif d’esprit, plein d’humour.

Effectivement, il peut être tout ceci.

Mais il peut être colérique, impertinent, tyrannique, insolent, exigeant, affabulateur.

Il est capable d’une violence inouïe avec un air d’innocence qui ferait fondre un bloc de marbre.

Il fait se disputer les parents entre eux, les parents avec des enseignants, et même les enseignants entre eux.

Cela me permet de comprendre, sans naturellement pouvoir les accepter, les remarques assassines qui se mettent à fuser dès que le sujet de la précocité intellectuelle est abordé :

  • Vous voulez tous que vos enfants soient des surdoués.

  • Vous devriez entreprendre une thérapie de couple.

  • La précocité est un fantasme de parents et de psy, tant pis pour eux.

  • Si c’était vrai, votre enfant serait premier.

  • La mode du surdoué est un fait de société.

  • En payant, on obtient ce qu’on veut.

  • Nous n’avons pas engendré une génération de génies, cela se saurait.

  • Tous les enfants obtiendraient le même résultat aux tests.

  • Tous les enfants auraient plus de 130 de quotient intellectuel.

  • Il y a de plus en plus de précoces.

Sur cette dernière remarque, une petite précision : il n’y a pas de plus en plus de précoces, mais plutôt, il y a de moins en moins de gâchis, le précoce non identifié venant souvent nourrir les statistiques de la dépression et du taux de suicide, sans parler de l’utilisation des drogues psycho-actives et des dérives vers la marginalisation et la délinquance.

  • D’autres prennent la parole pour dire que le quotient intellectuel n’existe plus : il est détrôné par les intelligences multiples. Un tel argument relève de la malhonnêteté intellectuelle, dans la mesure où il attribue aux divers quotients intellectuels une valeur sélective et prédictive, alors que le quotient intellectuel classique désigne simplement un potentiel accessible.

Ma fonction de psychanalyste me fait recevoir des adultes, des enfants, des adolescents en souffrance.

La précocité intellectuelle est un cas particulier de souffrance, dont les premières manifestations sont les angoisses, le marasme et le paradoxe scolaire, selon un processus tristement classique qui aboutit à l’état d’inhibition intellectuelle majeure.

Dans un premier temps, l’enfant comprend, assimile rapidement.

Il s’ennuie parce qu’il procède de la façon dont on visite un musée. Quand on visite un musée, on fait le tour d’une salle, après avoir fait le tour de cette salle, on passe à la deuxième salle, on ne fait pas deux fois de suite le tour de la première salle. L’enfant qui assimile très rapidement va picorer la surface. Parce qu’il est dans un groupe normatif, naturellement, très rapidement, il va demander quelque chose d’autre.

Il y a alors une sorte d’oxydation, d’engourdissement de ses potentialités. Il développe un manque de confiance en lui-même ainsi qu’une sous-estimation de ses capacités, il se crée alors un conflit intérieur, un doute intérieur chronique, une démotivation. Le conflit intérieur dégénère en conflits externes avec les manifestations classiques de l’angoisse.

  • Humeur dépressive ou irritabilité

  • Perte d’intérêt dans toutes ou presque toutes les activités

  • Perte ou gain de poids, augmentation ou diminution de l’appétit

  • Insomnie ou hypersomnie

  • Agitation ou ralentissement psychomoteur

  • Fatigue ou perte d’énergie

  • Sentiment d’être sans valeur ou culpabilité excessive

  • Difficulté de concentration ou de pensée, indécision

  • Pensée qu’il vaudrait mieux disparaître

L’identification de l’enfant ou de l’adolescent intellectuellement précoce se fait à partir de tests psychométriques et donc c’est un comportement qui dure.

Concernant le test psychométrique, je peux citer quelques exemples d’utilisation pratique des tests. La première situation concerne un jeune homme qui était en classe de seconde, qui était un lycéen pour lequel les parents étaient convaincus qu’il pouvait ramener du lycée autre chose que des résultats catastrophes. Donc les parents me contactent après avoir effectué les tests et il s’avérait effectivement qu’il y avait une sorte d’énigme à résoudre. En conséquence j’avais souhaité le recevoir toutes les 2 semaines et c’est lui-même qui s’est lassé de faire les déplacements de Lyon jusqu’à Nîmes parce que ça lui dévorait tout l’après-midi. Non pas le fait de passer une heure avec moi mais à cause des déplacements. Donc c’est lui-même qui nous a dit comment il procédait. C’est quelqu’un qui s’amusait à noter l’enseignant par l’intermédiaire de sa copie. C’est-à-dire que s’il considérait que l’enseignant avait effectué quelque chose lui convenant, sans mettre en doute naturellement la qualité de ce qui était proposé pour l’ensemble de la classe, alors il se disait, tiens, aujourd’hui l’enseignant mérite 17/20 donc il répondait à 17 questions. Mais s’il considérait que quelque chose ne lui convenait pas du tout il disait : il mérite 3/20 donc il répondait à 3 questions, pour avoir effectivement 3/20. Lorsque je lui indiquai que c’est par rapport aux principes qui permettent certaine forme d’évolution, principe de plaisir, principe de réalité qu’il se faisait plaisir aux dépens du plaisir de réalité à savoir que la note n’était pas la note de l’enseignant, naturellement c’était la sienne et qu’il risquait d’être mis sur une voie de garage. Donc il avait compris le système, je me proposai, vis-à-vis de son âge s’il était en d’accord, pour le raconter. Etant donné qu’une personne était informée ça n’avait plus d’intérêt de cacher quoi que ce soit. En plus son père a eu une réflexion amusante : « maintenant je comprends pourquoi et comment je fonctionnais moi-même. » C’est-à-dire que le père et le fils faisaient la même chose, mais le père le faisait sans s’en rendre compte, sans que cela soit conscient alors que le fils le faisait d’une façon tout à fait consciente.

Un autre exemple qui concerne un jeune homme qui allait passer son bac, qui était inscrit en math sup., qui était brillant partout. Il était parfaitement bien équilibré ; comme je le dit quelquefois, bien que ses parents soient tous les deux enseignants, il était bien équilibré ( Rires ) Donc il était brillant dans toutes les matières et logiquement, il pouvait s’inscrire dans une math sup. et malgré tout, les parents considéraient un certain malaise, pas dit d’une façon directe mais les parents détectaient quelque chose qui n’allait pas. Je ne lui pose pas franchement la question, mais propose de passer une batterie de tests tout à fait traditionnels. Effectivement à la lecture des résultats, tout était très bon, mais il y avait quelque chose en plus au niveau des qualités littéraires. Je disais aux parents que j’avais l’impression qu’il était plus littéraire que scientifique. A ce moment-là, malgré son âge, il a fondu en larmes. Après qu’il se soit ressaisit, il commence à dire que son désir était de s’inscrire à la fac de lettres, mais étant donné que le papa était professeur de mathématiques, il l’est toujours, et sa mère était professeur de biologie, il avait peur de décevoir ses parents. Etant donné qu’il était brillant partout, la voie royale qui s’imposait était celle-ci, et il avait peur de décevoir ses parents. Quand ses parents ont eu accès à cette information il a été désinscrit de math sup. et inscrit en fac de lettres.

Dans l’autre exemple qui est beaucoup plus particulier et qu’il convient de manipuler avec beaucoup de précautions c’est pour un enfant que je recevais dans un contexte qui n’a rien à voir avec quelque chose de scolaire. C’était un enfant qui était hospitalisé à Paris dans le pavillon des cancéreux. Un enfant considéré comme étant perdu et les parents m’avaient contacté pour me demander de l’accompagner. On ne se pose pas la question de quel accompagnement il s’agit. Il rentrait à l’occasion des vacances et passait un mois et demi dans le pavillon des cancéreux pour enfants. Donc je recevais l’enfant dans cette perspective en lui proposant par réflexe, c’est-à-dire de façon très occupationnelle, des exercices qui sont habituellement proposés dans les tests psychométriques. Et il s’avérait que l’enfant se débrouillait très bien par l’intermédiaire de ces différents jeux et différentes activités. Et je dis aux parents que j’avais l’impression que leur enfant faisait partie d’une certaine catégorie de très hauts potentiels. Les parents me disent, vous savez le terrain des surdoués ce n’est pas notre truc on vous laisse faire. Je passe sur les détails. En même temps sa situation physique s’est stabilisée. Le chirurgien prévoyait une intervention. Cela s’est bien passé, mais ils ont sorti de son abdomen un kyste qui avait la taille d’un pamplemousse. L’intervention a eu lieu, tout s’est stabilisé, et quelques mois plus tard, l’enfant était considéré comme rescapé du cancer. Naturellement, le travail du chirurgien était prioritaire sur l’aspect psychométrique, mais je me plais à penser que d’une certaine façon le fait de cette identification a pu contribuer à cette résurrection. L’enfant en question, pour l’anecdote, s’amusait, pour se faire de l’argent de poche à montrer sa cicatrice.

Répondre à la question « qu’est-ce que le quotient intellectuel ? », c’est d’abord reconnaître que ce qui peut être gênant dans l’évocation du quotient intellectuel, que l’on retrouve malheureusement dans nombre de magazines et d’émissions télévisées, c’est le monométrisme, c’est-à-dire cette tendance à mettre en exergue une seule grandeur, une valeur unique, en négligeant l’existence, l’interaction d’une pluralité de variables indépendantes entre elles. Mais ce n’est pas une raison pour clamer le trépas du quotient intellectuel, à partir du moment où son utilisation se fait non pas dans le sens d’une finalité, mais dans celui d’un outil de travail avec une lecture précise de l’ensemble des informations données par l’examen psychométrique.

On en vient au quotient intellectuel. Le quotient intellectuel c’est le rapport qui existe entre l’âge réel et l’âge mental. Si on prend par exemple un enfant de dix ans et un enfant de douze ans. Si l’enfant de dix ans comprend aussi bien que son voisin on considère qu’il a douze ans d’âge mental. On prend les douze ans du voisin qu’on divise par dix : 1,2 et pour des questions de facilité on multiplie par 100 : un enfant qui a 120 de quotient intellectuel. C’est un enfant qui potentiellement a deux années de décalage par rapport à son âge réel.

C’est-à-dire que tout âge confondu, du cours préparatoire jusqu’à la terminale, la valeur de référence est la valeur 100.

L’enfant qui a 100 de quotient intellectuel est un enfant qui est parfaitement dans la norme, et le chiffre des dizaines indique en années le décalage, en plus ou en moins, par rapport à son âge réel. C’est-à-dire qu’un enfant qui a 80 de QI, de 8 pour aller à 10 il manque 2, c’est un enfant qui potentiellement aura 2 années de retard.

Donc le quotient intellectuel global qui se divise en deux autres résultats, le résultat verbal qui est le reflet des connaissances et acquisitions ; le résultat de performance qui représente ce que l’intelligence peut avoir d’inné. Donc il ne fait pas intervenir les connaissances et les acquisitions.

Il y a trois résultats, un résultat global qui est une sorte de vision d’ensemble, sans être la moyenne des autres, un résultat verbal de connaissances et un résultat de performance pour le savoir.

La première lecture, c’est celle de ces résultats chiffrés.

Si l’enfant a 70 de quotient intellectuel, le 7 indiquant qu’il y a trois années en moins, on parle de potentiel, pour bien distinguer le potentiel de la restitution scolaire. Il existe cette confusion, c’est-à-dire de confondre le potentiel avec la restitution scolaire. Je parle toujours en terme de potentiel qui désigne la qualité de l’intervenant.

Donc la première lecture du résultat, c’est celle du résultat chiffré et la deuxième lecture, que je considère comme étant la plus importante, consiste à comparer le résultat verbal du résultat de performance. C’est-à-dire que si par exemple un enfant a 80 de quotient verbal et 80 de Q.I. de performance, c’est un enfant qui globalement a deux années de retard, et si l’on part du principe de considérer qu’il n’y a pas de sot métier, c’est un enfant qui a 2 années de retard et très peu de chance d’avoir un avenir universitaire. Mais en même temps c’est un enfant qui est en équilibre avec lui-même. Si j’utilise une image, qui vaut ce qu’elle vaut, celle d’un véhicule, moteur de 2 CV, carrosserie de 2 CV, c’est un véhicule qui ne fera pas les 24 heures du Mans, mais en même temps, c’est un véhicule qui, à sa façon, tient la route. Si c’est un enfant qui a 95 de quotient verbal et 100-105 de quotient intellectuel de performance, c’est un enfant qui vit au quotidien de ses capacités ; par exemple qui entre en sixième, qui a assimilé le programme de CM2, l’année suivante il est susceptible, toujours en terme de potentiel, d’assimiler le programme de cinquième.

Maintenant, cette deuxième lecture, elle compare le résultat verbal au résultat performance, on regarde s’il y a équilibre entre les deux ou, au contraire, s’il y a ce qu’on appelle dyssynchronie externe, c’est-à-dire un décalage important entre la partie verbale et la partie performance. Il y a une dyssynchronie externe lorsque le décalage est au moins égal à deux ans: entre 90 et 110, 140 et 120, 110 et 130. Lorsqu’il y a 2 années de décalage, indiqué par le chiffre des dizaines, il y a dyssynchronie externe. A ce moment-là on se pose la question «  pourquoi cette dyssynchronie ? » Est-ce que c’est un enfant qui fonctionne en sur-régime comme si on demandait trop pour la qualité du moteur, ou c’est un enfant qui fonctionne en sous-régime, comme si on imposait à une Mercedes de rouler à 60 à l’heure. Cela, c’est la deuxième lecture.

La troisième lecture des résultats c’est la notion de niveau d’âge qui consiste à considérer pour la partie verbale ainsi que pour la partie performance, le résultat le plus élevé et le résultat le plus faible.

Par exemple, un enfant a vraiment 10 ans, mais pour un exercice donné, il fera par exemple 15 points, en fait pour ces 10 ans, ces 15 points sont transformés en une note, par exemple 17 sur 19. La question qui se pose est « quel serait l’âge du sujet moyen, qui avec une quantité identique de points aurait 10 ? » On aurait par exemple l’enfant de 10 ans, qui vis-à-vis des points les plus élevés, aura le comportement du sujet moyen de 14 ans et 3 mois, et pour son résultat le plus faible, aura le comportement du sujet moyen de 8 ans et 6 mois. Cela signifie qu’il y a une dispersion très importante entre le maximum et le minimum, puisque, tantôt selon la nature de l’exercice, il se comporte comme quelqu’un de 14 ans alors que pour l’autre exercice, il se comporte comme quelqu’un de 8 ans. A ce moment il y a dyssynchronie interne. Une dyssynchronie interne, pouvant se retrouver aussi bien au niveau verbal qu’au niveau performance. Inversement, quand on prend un autre enfant par exemple, réellement de 10 ans et vis-à-vis de son item le plus élevé ayant le comportement du sujet moyen de 14 ans et 8 mois, et pour son minimal item il montre le comportement du sujet moyen de 13 ans et six mois, cela signifie qu’il y a homogénéité dans le résultat, pas de dyssynchronie.

Et la dernière lecture des résultats, c’est une répartition des résultats sur 2 courbes. En tout, il y a treize exercices, six exercices pour les connaissances, les acquisitions et sept exercices qui sont des exercices d’observation, de logique, treize résultats. Chaque résultat évalué sur 19 pour ne pas confondre avec quelque chose de scolaire et ces 13 résultats qui se répartissent sur 2 courbes. Ces 2 courbes se lisant comme la radiographie des potentialités, c’est-à-dire que s’il se pose une question d’orientation scolaire, la présence d’un pic supérieur permettra de dire, l’enfant a des facilités, dans tel domaine, il est plus scientifique, ou plus littéraire, ou plus technologique, vraiment tout en considérant l’aspect plus formatif et non pas décisionnel. La présence d’un pic inférieur pourra mettre en évidence des faiblesses, des lacunes par rapport à certains aspects de ses connaissances, à ce moment-là, il sera bon d’intervenir pour colmater ou bien pour renforcer là où sont les faiblesses. Si c’est dans la partie verbale ça concerne ses connaissances, mais la partie performance peut mettre en évidence des problèmes de latéralité ou bien des problèmes de distinction de main droite ou de main gauche, ou des problèmes de perception de l’espace, ou des problèmes de perception des volumes.

A ce moment-là si l’enfant se situe dans le créneau pour lequel on parle de précocité intellectuelle, c’est-à-dire dans un créneau situé entre 125 et 160, l’enfant procède selon ce que j’appelle la loi du tout ou rien. C’est-à-dire, ce sont des enfants qui n’aiment pas ou qui adorent. Or si l’enfant a des problèmes au niveau de la perception des volumes, c’est un enfant qui à partir de la quatrième, puisque jusqu’en quatrième la géométrie n’est pas vraiment standardisée, risque d’avoir des difficultés en géométrie. A partir de la quatrième c’est une matière qui intervient dans les maths, l’enfant qui aurait des problèmes de perception des volumes, c’est un enfant qui risque d’avoir des difficultés en géométrie, et du fait de la loi du tout ou rien, on dit qu’il déteste les mathématiques alors que cela provient d’un point faible au niveau de la perception des volumes. D’où l’intérêt de colmater, de renforcer cette faiblesse vis-à-vis de la perception des volumes en proposant des activités de précision : tir à l’arc, tir à la carabine, prestidigitation, poterie, danse synchronisée, ou batterie, tout ce qui peut faire intervenir la notion de volume, de distance, de cadre, également pour renforcer là où il y a un point faible pour éviter qu’un processus de contestation puisse se mettre en place. Donc ce sont ces 2 courbes, qui se lisent comme des radiographies, qui permettent de montrer les points faibles où il est bon d’intervenir pour consolider tel ou tel aspect. La finalité étant de réduire une dyssynchronie interne lorsqu’elle a lieu, ou de modifier une dyssynchronie externe lorsqu’elle existe.

C’est l’exploitation des tests psychométriques, et du comportement, c’est-à-dire des éléments caractéristiques qui permettent de dire « il semblerait qu’il y ait précocité intellectuelle. » Naturellement un seul des éléments qui va suivre n’est pas suffisant pour dire qu’un enfant est intellectuellement précoce. Il ne faut pas non plus considérer qu’un enfant doit avoir tous ces éléments caractéristiques pour être désigné comme étant précoce. Mais quand la majorité de ces points de description se recoupent, on peut dire effectivement « il semblerait que » et c’est à ce moment-là que les tests psychométriques viennent confirmer qu’il se situe dans ce créneau qui officiellement est bien un créneau d’intelligence supérieure. Je considère cette expression comme étant plutôt haïssable. Je préfère remplacer « intelligence supérieure » par le créneau de « potentialité supérieure », potentialité désignant le fait qu’il n’y a pas forcément restitution scolaire.

Donc les traits caractéristiques, c’est ce que j’appelle le fonctionnement en « hyper », donc c’est l’hyperémotivité, c’est l’hypersensibilité, c’est l’hypersusceptibilité. Par exemple, en classe, à un enfant qui est normatif, c’est-à-dire tout à fait dans la norme, qui a fini son travail, la maîtresse d’un geste va lui dire d’aller au fond de la classe. Un enfant normatif va dire « quelle aubaine », un enfant qui se situe hors norme va dire « qu’est-ce que j’ai fait ? » Il va mal comprendre ce geste, il va se culpabiliser facilement, il y a une certaine forme de grand flou qui se met en place parce que sa susceptibilité aura été égratignée.

Pour, cette hypersensibilité, j’ai un exemple assez surprenant. C’est celui d’un garçon qui était en troisième et qui souhaitait rentrer dans une école militaire, il se trouve que son père était sous-officier. C’était une chose qui ne présentait pas de problème, a priori. C’était un garçon très brillant en troisième. Il se présente au concours et il y a échec, de façon surprenante. Pour entrer dans une école militaire, il y a une condition, on ne peut s’y présenter plus de deux fois. Donc les parents me contactent, je propose les tests pour quantifier la qualité du terrain. A la lecture des résultats, manifestement, il y avait une sorte d’énigme qu’il fallait résoudre. Mais, je passe sur les détails, cela suppose un travail d’exploration proche de celui de Sherlock Holmes, pour savoir ce qui se passe exactement à l’intérieur du jardin secret qu’un enfant, qu’un adolescent, ouvre très difficilement. C’est quelqu’un, un enfant, un jeune homme, qui n’acceptait pas l’idée que son père puisse se mettre au garde-à-vous devant lui. C’est-à-dire, que, lorsque, entrant dans une école militaire pour être officier, son père, un jour, risquerait de se mettre au garde-à-vous devant lui, c’était une chose qui lui était insupportable. Il a fallu utiliser trois arguments pour qu’il puisse se réaliser. Lui faire remarquer que quand il serait officier, son père serait à la retraite, de toute façon ils seraient dans deux endroits différents, c’est-à-dire que localement, au domicile, le père redeviendrait le Père et que le fils redeviendrait le Fils. Et puis l’argument majeur c’était que le père était très fier d’avoir un officier dans la famille. Alors l’enfant s’est représenté à son concours et il a été reçu.

Dans cet exemple de sabordage inconscient, complexe, un véritable équivalent dépressif généré par une interdiction sur lui-même, le sur-moi moral de cette situation l’empêchait d’accéder à cette perspective d’être officier alors que son père n’était que sous-officier.

La loi du « tout ou rien » qu’on évoquait tout à l’heure, et il y a le « tout et tout de suite » qui peut se solder par des exigences. On peut considérer comme des exigences d’un enfant roi ou bien par un renoncement massif. Par exemple, on dit à l’enfant « on va aller au cinéma » et entre temps une bêtise a été commise. Pas de cinéma. L’enfant dira « de toute façon, je déteste le cinéma. » Et pendant des années il n’ira pas au cinéma parce qu’un jour, il a décidé qu’il détestait le cinéma.

Des facilités dans les actes d’autonomie, le parler, le marcher, la lecture. Des difficultés ou bien le refus des activités collectives, ainsi que dans les activités duelles. Ce sont des enfants qui très souvent refusent l’expression  du « contre quelqu’un », ils préfèrent l’expression « avec » que « contre », donc ils refusent les activités collectives parce qu’on se bat contre quelqu’un ou les activités duelles parce qu’on se bat également contre quelqu’un. Lorsqu’on préconise le tir à l’arc par exemple, c’est parce qu’à ce moment-là les activités duelles n’existent pas, dans la mesure où l’autre c’est une cible, c’est-à-dire une partie de l’enfant lui-même.

Une maladresse dans les activités manuelles et la graphie. La dysgraphie est très présente. D’ailleurs à ce sujet souvent des parents se présentent avec une feuille d’imprimante et disent : mon enfant sait écrire. Je dis non votre enfant ne sait pas écrire, il sait taper sur un bouton, ce n’est pas du tout la même chose. A ce moment-là, plutôt que de préconiser le fait d’écrire à répétition, la répétition de plusieurs mots, plusieurs lignes, pour dire plus l’enfant écrit, mieux il apprendra à écrire, je préconise, plutôt des ateliers de calligraphie, de telle sorte qu’il y ait une réhabilitation de la lettre. La lettre peut devenir quelque chose de joli à regarder. Je préconise l’écriture anglaise, l’écriture arabe, l’écriture chinoise. Par exemple il désignera le contenu d’un cahier, d’un tiroir, d’un réfrigérateur. A ce moment-là, la lettre dans son esthétique va être réhabilitée, elle pourra être de façon efficace intégrée dans le mot.

Une curiosité dans les domaines non tangibles : la vie, la mort, l’espace, l’infini, Dieu. Fascination pour les sujets sordides, ainsi qu’une attirance pour le surnaturel, la sorcellerie, le satanisme qui donnent une impression de puissance qui compense la situation de précocité intellectuelle ou les frustrations très souvent pathologiques.

Une extrême lucidité, qui déstabilise très souvent les interlocuteurs. C’est l’exemple d’un enfant qui est en classe, et la maîtresse qui fait sa classe comme d’habitude, et à un certain moment, les enfants sortent, et l’enfant s’approche de la maîtresse en question et lui dit « qu’est-ce qui ne va pas aujourd’hui ? » Et la maîtresse a fondu en larmes. En fait, il y avait eu un deuil dans sa famille, et par discrétion, elle avait décidé de porter un masque pour faire momentanément comme si de rien n’était vis-à-vis des élèves. Donc cela marchait pour l’ensemble des élèves sauf celui-ci qui s’était rendu compte qu’il se passait quelque chose de particulier.

Un raisonnement au-dessus de son âge ou un comportement infantile. C’est quelque chose qui rejoint la notion d’âge refuge. Concept que j’ai mis en place il y a quelques semaines parce que, très souvent, quand dans une émission on entend parler de quotient intellectuel, on imagine toujours ses années par le plus. C’est-à-dire que, si par exemple un enfant a 10 ans, s’il a un quotient intellectuel de 140, on va dire l’enfant a un âge mental de 14 ans, le 4 des dizaines s’ajoutant à l’âge réel. Et très souvent les parents disent, oui, mais c’est encore un bébé. C’est quelque chose qui peut s’expliquer par rapport au fait que ce sont des enfants qui ont très souvent le sommeil perturbé par des cauchemars. Ce sont des enfants qui rêvent deux fois plus que des enfants normatifs. Et si des personnes pouvaient douter de la précocité intellectuelle comme je l’entends quelquefois, il faudrait se pencher sur l’électroencéphalogramme qui indique qu’il y a deux cassettes de rêves au lieu d’une. Ce sont des enfants qui rêvent deux fois plus, ce qui explique également la raison pour laquelle ce sont des enfants qui ont beaucoup moins besoin de dormir que les autres. La qualité du sommeil, ce n’est pas la quantité horaire mais la qualité du sommeil paradoxal. Donc il y a deux cassettes de rêves au lieu d’une. Sur fond d’hyperémotivité, d’hypersensibilité, très souvent ces rêves sont truffés de cauchemars. Donc il y a agitation nocturne, il y a cauchemar, terreur nocturne. Cela peut aller jusqu’au somnambulisme. Cela, c’est pour la nuit. Le jour du fait du questionnement métaphysique, sur la vie, sur l’infini, sur l’espace, l’enfant est traqué par des inquiétudes, par des angoisses. A ce moment, il va mettre en place l’âge refuge. C’est-à-dire que ces années de décalage qu’il pourrait avoir en plus, et bien il les développe en moins. C’est-à-dire en fait qu’il n’y a pas un enfant mais trois. L’enfant avec son âge réel, son âge mental, mais aussi son âge refuge. Il peut se retrouver par exemple, qu’un enfant regarde une émission à caractère scientifique, mais tout en suçant son pouce. A ce moment-là, il y aura simultanéité entre l’âge mental et l’âge refuge. Ce sont des enfants qui, du fait de ce décalage par rapport à leur âge mental, sont très souvent attirés par les plus âgés. Parce que précisément il est plus intéressant d’être avec des plus grands , parce que c’est auprès des plus grands qu’ils peuvent glaner le plus d’informations. Considérant que ceux de leur âge sont bien gentils mais un peu « cul-cul la praline ». Donc il y a cette attirance vers des plus âgés ou vers des plus jeunes parce que, là au moins, ils peuvent développer quelques responsabilités.

Ils ont un sens aigu de la justice et de l’équité qui désigne la vertu de celui qui respecte les droits de chacun. Le précoce revendique des droits pour lui, mais surtout pour les autres et il oublie les devoirs au sens propre du terme.

Le déni de l’échec : les crises du précoce devant l’échec sont spectaculaires, au point de supporter le terme de crise « hystériforme. » Une jeune fille de Montpellier, son père me disait :  « si un jour vous venez à la maison, vous allez voir une porte avec un trou. C’est la porte de la chambre de ma fille. » La porte était en chêne, mais la fille passait ses nerfs sur la porte en question.

C’est la facilité de justification par accommodation des données, c’est l’affabulation, la mythomanie. A propos d’affabulation, je vais citer l’exemple d’une enfant qui avait 8 ans à l’époque et qui avait été privée d’aller faire les commissions. Pendant que sa maman sort faire ses courses, elle reste à la maison. Quand la maman revient, eh bien, elle voit une voiture de police et une ambulance garées devant chez elle. L’enfant avait téléphoné au commissariat et avait dit « maman est morte juste à côté de moi. »

La causticité de l’humour : l’humour des précoces est très caustique, au point de faire confondre la pertinence avec l’impertinence. En terme d’impertinence, par exemple, j’ai eu l’occasion de proposer le squigglegame qui consiste à proposer à un enfant de commencer un dessin et je le termine ou je commence un dessin et c’est l’enfant qui le termine. Ce qui permet de sonder ce qu’il y a à l’intérieur de l’enfant. J’avais commencé par faire la moitié d’un ovale et l’enfant avait complété en faisant un oeuf. Et naturellement je pose la question à l’enfant qui avait 6 ans et demi : «  Qu’est ce qu’on va faire sortir de cet œuf ? » Il me regarde en fronçant les sourcils et me répond : « pourquoi, tu veux en faire sortir une vache ? »

Ou bien, parmi les tests, il y a une question qu’on pose dans des exercices de situation. Un exercice consiste à poser la question « qu’est-ce qu’on fait quand on voit sortir beaucoup de fumée de la fenêtre des voisins ? » Un enfant m’a répondu « ça dépend des voisins » 

Une forte tendance à la rêverie, quand je dis une tendance, c’est plus qu’une tendance parce que cela représente un des trois gros piliers disons du paradoxe de l’échec scolaire du précoce qui est la perturbation scolaire, la perturbation de la classe et la somatisation.

 Les difficultés d’endormissement du fait de ces sommeils agités, du fait de ces deux cassettes de rêves, des cauchemars, de l’idée du cauchemar. L’enfant ne peut pas s’endormir parce qu’il redoute ce rendez-vous avec les monstres de ses cauchemars, l’angoisse, l’agitation nocturne, le somnambulisme.

L’énurésie. L’énurésie peut être considérée comme la conséquence du fait que ces deux cassettes. L’enfant pris par les cassettes en question n’entend pas ce petit signal qui lui dit d’aller au petit coin. Très souvent, jusqu’à des âges de treize, quatorze, quinze ans, les enfants sont victimes d’énurésie, précisément parce que ces 2 cassettes ont un effet très attractif sur l’enfant qui ne peut pas se libérer du rêve.

La somatisation, c’est-à-dire lorsqu’un enfant se trouve dans un contexte qui est assez particulier. La métaphore que j’aime bien utiliser parce qu’elle est assez marquante, c’est par exemple un enfant de sixième, qui mesure 1m90 pour 120kg et qui mange à la cantine. Il se trouve qu’au menu de la cantine ce sont des petits pois et une tranche de jambon. Mais, il faut s’attendre à ce que l’enfant mange ses petits pois, son jambon, et, qu’ensuite, il demande un supplément. Or, d’une façon paradoxale, l’enfant va jeter le contenu de son assiette, ce qui conduit ce geste, ce ne sont pas les petits pois ni le jambon, c’est le fait de ne pas avoir été vu, ni par rapport à son poids, ni par rapport à sa taille, et c’est là que se met en place une sorte de spirale infernale dans la mesure où le responsable de la cantine va dire « pourquoi donner du supplément à un enfant qui gaspille la nourriture ? » Or, cette façon de jeter l’assiette, pourra être justement de perturber la classe, pourra être la rêverie, et, c’est la somatisation. En terme de somatisation, cela va être de l’eczéma, l’énurésie qui ne l’empêche pas d’aller en classe mais qui est aussi une façon de dire quelque chose. Ce sont les migraines à répétition, ce sont les douleurs abdominales à répétition, des bégaiements, des mouvements stéréotypes, c’est-à-dire des tics, c’est une forme d’asthme. Tout en considérant, naturellement, que le côté physiologique doit être prioritaire, si un enfant a mal au ventre, on pense d’abord à une crise d’appendicite, mais lorsque les examens biologiques ne donnent rien de particulier, je peux penser que l’enfant, à sa façon, concocte quelque chose.

La concentration extrême pour les activités que l’enfant a choisies et les difficultés de concentration par rapport à ce qui ne l’intéresse pas. Donc l’enfant va s’éloigner, ne peut pas se concentrer sur quelque chose qui ne l’intéresse pas, par contre, il sera particulièrement absorbé par rapport à ce qui l’intéresse, y compris lorsqu’il s’agit de taquiner quelque chose ou quelqu’un.

Exemple, un enfant qui regardait la télévision et qui semblait très absorbé par la télévision jusqu’au moment où sa maman interroge son grand frère ou sa grande sœur, une question du style  « six fois six », le grand répond « trente cinq », l’enfant qui est absorbé par la télévision, se retourne et « non, six fois six, c’est trente six » et continue à regarder sa télé.

La paresse. La paresse, on peut y consacrer tout un chapitre. Il faut dire que la paresse de l’enfant et de l’adolescent intellectuellement précoce est spectaculaire. Elle commence par le manque d’intérêt devant l’impossibilité d’approfondissement des activités et se poursuit jusqu’à la démotivation scolaire, en passant par le surinvestissement extrascolaire : les jeux électroniques, les jeux informatiques véritable gangrène du siècle, les jeux de rôles, les copains, non pas dans le sens de la camaraderie, qui serait saine, mais dans le sens des regroupements statiques et très proches de la délinquance.

Pour l’enfant, lorsqu’il renonce à l’exercice de cette potentialité, la paresse représente souvent, un système de défense contre l’angoisse.

Avant d’en finir avec une description qui pourrait paraître tout particulièrement inquiétante, je tiens à vous préciser qu’il existe des enfants précoces heureux, et que, même s’ils représentent une minorité que j’évalue à peu près à 25%, contre 75% en précarité relationnelle ou scolaire, en rupture familiale de type socio-pathologique ou en échec scolaire, les 25% de précoces heureux représentent un fabuleux trésor de recherche pédagogique dont l’observation permet d’armer les spécialistes de l’enfance et de l’adolescence, mais aussi de l’adulte, à établir une stratégie pédagogique thérapeutique ou de remotivation.

Ce qui intéresse le chercheur, c’est la prise en compte des processus opératoires à travers lesquels le sujet réalise une performance intellectuelle, mais aussi les facteurs qui déterminent son engagement dans ces processus : c’est la motivation, qui concerne l’engendrement des conduites, ainsi que les facteurs internes de cet engendrement.

Quant aux 75% de précoces en souffrance de ce que j’appelle le handicap par le plus, il est bon de considérer leur pathologie dans sa réversibilité : lorsque le potentiel accessible ne coïncide pas avec le potentiel de restitution, tout est possible. L’accompagnement, le suivi psychologique dont ils ont besoin permettent largement d’envisager une évolution heureuse, plus simple lorsque l’enfant est identifié plus jeune, mais toujours réalisable, quel que soit l’âge de l’intéressé, sans l’urgence du temps, étant entendu que la priorité demeure son équilibre et la réalisation de sa personnalité. Le plus beau métier du monde existe : celui que l’on exerce avec plaisir. Être énarque ou virtuose, on verra plus tard.

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